Une vérité, pour être réelle, doit pouvoir garder sa crédibilité quels que soient les domaines dans lesquels elle est appliquée.
Il en est ainsi de l’expression de la violence qui ne peut être identifiée que par l’analyse du contexte par lequel elle s’exprime. Certaines sont provoquées, souvent par intérêt; D’autres sont réactives et tendent à rétablir un équilibre; D’autres enfin n’ayant pour seule raison que la contrariété sont autoritaires et s’apparentent à la première.
Dans tous les cas, les violences sont émotionnelles, mais une seule est légitime, celle du rééquilibrage puisqu’elle découle des deux autres.
Une violence provoquée est pratiquement toujours l’œuvre de personnes qui font un usage inapproprié de leur position dominante.
Ces trois formes de violence sont hiérarchiquement liées et obéissent toutes à un processus qui se retrouve partout en toutes circonstances de la plus simple à la plus complexe.
La médecine peut être prise pour exemple au niveau individuel. Elle est a priori dépourvu de violence. Pourtant, lorsque le personnel soignant manque de compétences, donc de délicatesse, l’intervention peut devenir anormalement douloureuse. Si (1) malgré les recommandations, l’intervenant persiste au lieu de s’adapter, la douleur va susciter de l’irritation, puis (2) de l’exaspération allant jusqu’à provoquer un rejet souvent doublé d’une explosion de colère pour faire cesser la douleur devenue insupportable.
Enfin (3) les mots ou les actes de l’intervenant qui en résultent pour censurer le mécontentement confirment le bien-fondé de la colère qui ne cessera que lorsque l’équilibre sera rétabli.
C’est également vrai en collectivité (travail, amis, voisins…). L’exemple le plus propice est celui d’un parent qui pratique une activité nécessitant de la concentration. L’enfant joue à proximité. Son jeu devient bruyant. Le parent lui demande de jouer en silence, mais (1) l’enfant ne tient pas compte de l’observation et continue. Alors le parent, comme précédemment, sera irrité puis (2) exaspéré pour finir par l’envoyer jouer ailleurs afin de pouvoir travailler dans de bonnes conditions.
Les cris et pleurs de l’enfant qui va demander le soutien de l’autre parent pour s’opposer à cette décision (3) confirment la volonté de nuire au bien-fondé d’une décision qui tend à rétablir un équilibre.
Les deux exemples précédents servent à mieux comprendre quelle violence s’exprime s’agissant de heurts entre blocs de population.
Hélder Pessoa Câmara (1909 – 1999), l’expliquait en ces termes :
« Il y a trois sortes de violence.
La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés.
La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première.
La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres.
Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. »
Quand la fracture est consommée, la reconstruction n’est possible que lorsque la deuxième violence parvient à faire taire la troisième.
Denis Notari – 7 janv. 2019